Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

C'est l'histoire d'une vie de toutes les couleurs. C'est l'histoire d'un amour de douleur. C'est le temps de quelques joies et bonheur. C'est le temps de quelques hésitations et terreurs.

Les aléas d’une banlieusarde : On prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie.

quai-de-gare.jpg

 

Ce matin, comme à mon habitude, les cheveux encore mouillés de la douche et attachés négligemment par une pince à cheveux, je ferme la porte de mon appartement et descend le vieil escalier des années 70 de mon immeuble. J’actionne le petit bouton sur la porte en m’appuyant lourdement sur celle-ci. Evidemment ! Sinon, cette technologie de pointe dans un but ultra-sécuritaire se referme immédiatement et on a beau appuyer de nouveau sur ce petit bouton qui écorche le doigt, on ne sort jamais.

 

Je sors donc, sous l’air glacial de ce mois de Février. Il fait encore nuit. C’est déprimant. Cachée sous un bonnet en laine, une écharpe et un manteau fin - faudrait pas ressembler à une banlieusarde en mettant une doudoune!- On marche vite, on essaie d’échapper au vent qui s’infiltre dans les interstices mais cet air froid pernicieux vise toujours les quelques centimètres de peau non couverte et les envahit jusqu’à les glacer.

 

Alors on marche vite, accompagnée du bruit monotone du clac-clac des talons hauts sur le bitume froid et gris. On n’y pense pas mais on regrette déjà d’avoir mis ces talons. On cherche toujours à paraître coquette, jolie et surtout classe…Bah oui quand on travaille dans un groupe international qui se vente de sa position de Leader français, on ne se permet pas la moindre erreur. C’est sûr qu’à 7h30 du matin, cachée sous de l’anticerne, du fond de teint, de la poudre, du blush, du fard à paupière et du mascara fraîchement déposé, on présente bien…mais ce soir, des cernes jusqu’aux joues, avec un fard effacé, un fond de teint atténué, on aura l’air d’un cadavre déguisé en clown mais on aura donné le change. On aura été fidèle à l’image que nous devons donner en temps que représentant de l’entreprise.

 

Ah mais, on allait oublier !! Il y aura ces si jolies bottes à talons qui valent les regards appuyés des jalouses et les compliments des autres…Je vous le dit, il n’y a pas de quoi ! Oooh, Elles sont jolies mais elles ne tiennent pas chaud et en plus marcher avec un dénivelé de 10 cm toute la journée…vous imaginez votre voûte plantaire ? Nan, vous ne pouvez pas…Seules les femmes, prisonnières comme moi du devoir de paraître le peuvent.

 

Bon pendant, ces réflexions, perchée sur nos talons, on avance et on fini par arriver à l’arrêt de bus. Alors, sagement comme un chien bien dressé, on attend. On rentre ses mains dans ses poches. On prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie que le bus arrive vite. Evidemment, c’est toujours ces jours là, où on a mis de hauts talons, où le manteau est trop léger et qu’il fait au moins -15°C (température ressentie, s’il vous plait), qu’on attend 10 min avant de voir se profiler au loin l’avant du bus. 

 

On se réjouit. On voit le bus arriver à toute allure et c’est là qu’on tilte : la carte de transport !! On sort laborieusement ces mains des poches du manteau, On essaie d’enlever les gants tout en avançant vers les quatre pèlerins agglutinés, qui se bousculent à l’entrée du bus. On ne sait jamais : Le chauffeur pourrait refermer les portes devant votre nez et vous empêcher de monter !! Et là les gants dans une main, on ouvre son sac à main, sauf que…Mesdames, vous compatirez avec moi : On ne sait pas pourquoi mais il y a toujours des choses étranges dans un sac de femme - Tout un tas de petites choses indispensables, surtout à emmener partout et que l’on n’utilise jamais - En plus, la carte de transport que l’on range proprement à chaque fois dans une petite poche intérieure pour la retrouver facilement n’est plus là. Evidemment, hier, on était pressée et on l’a glissée négligemment dans le sac…cela ne signifie qu’une chose… Il va bien falloir 10 bonnes minutes pour retrouver la dite carte et peut-être même vider le sac.

C’est désespérant, non ! Je vous le dit le destin s’acharne contre nous, pauvres femmes…

Alors, on jette un regard discret au conducteur…Ouf, il est tellement occupé à regarder le décolleté de la jeune fille à peine pubère qu’il ne verra pas qu’on ne pointe pas –Une petite parenthèse : vous avez remarqué, il y a toujours une jeune fille ou une jeune femme défiant les lois de la nature qui se balade à -15 dehors, avec un petit blouson, un décolleté jusqu’au nombril et en mocassins. Je vous le dit ces nanas, soit elles ont un chauffage en filigramme greffé dans leur peau, soit il leur manque des terminaisons nerveuses pour ne pas sentir le froid…

 

Toutefois, à leur décharge, on n’a pas froid dans le bus. Bah oui, quand on ne se retrouve pas collé contre la vitre, le chauffage est à fond. Au bout de 5 min, on se retrouve transpirant, on prit, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie que le pull blanc que l’on a mis ne reflète pas cet état. Et puis, on essaie discrètement d’éponger les gouttes qui ruissellent le long de notre visage. Pas moyen qu’un abruti de chauffage ruine tout ce travail de maquillage !!

 

On arrive enfin devant la gare RER, on met le pied dehors et là, on se prend une gifle !! Et oui, 40°C de différence en une microseconde, c’est dur. On reprend notre marche, au rythme du clac-clac des talons en serrant légèrement les dents.  Bah oui, une marche jusqu’à l’arrêt de bus et la station debout pendant le trajet a déjà mis à mal notre voûte plantaire.

Tout en marchant tant bien que mal, on cherche sa carte de transport. Cette fois-ci, on n’y échappera pas, pour se rendre sur le quai du RER, on devra valider son titre à la borne. On fouille mais évidemment, on ne la trouve pas. C’est toujours dans ces moments-là que ce bien précieux parvient à se cacher dans un espace de 20cm carrés. On se résigne, on commence par transférer le paquet de mouchoirs en papier, le portable, la pochette de maquillage dans une poche intérieure vide. Cela laissera un peu de place pour déterrer la dite carte. On continue nous fouilles archéologiques tout en marchant clopin-clopant. On déterre, une vieille barre de céréales, des tickets de caisse et de parking, la totote de la petite qu’on cherchait depuis trois mois mais toujours pas de carte. Alors on fini par se résigner. On s’arrête devant les bornes de la gare, on essaie de ne pas s’énerver par les gens qui même avec un mètre d’espace pour circuler, trouve le moyen de vous bousculer. On transfère le contenu du sac, tant bien que mal dans nos poches, puis une main, en gardant l’autre libre pour fouiller. On sort le portefeuille, le chéquier, le porte monnaie, les clefs, la bouteille d’eau. On fini par se retrouver le sac vide et là… toujours rien. Là, on commence à avoir des sueurs, on se dit qu’on a trouvé le moyen de la perdre !

Alors on entreprend la démarche inverse, tout en jetant un coup d’œil sur l’arrivée prochaine du RER. On examine le porte-monnaie, la bouteille d’eau sous tous les angles. On vide ses poches, on re-rempli le sac à main et là coincée entre les deux plis du portefeuille, on voit quoi…la carte de transport.

 

Evidemment à ce stade, on a envie de tout jeter par terre et de rentrer se coucher mais on est courageuse alors même si on sent les nerfs se tendre, on souffle un bon coup, on referme le sac tant bien que mal et on valide enfin sa carte. On regarde les écrans d’affichage et on s’étonne que notre RER ne soit même pas à l’approche. Blasée, on se dit qu’il y a un peu de retard : 5-10 min, ce n’est pas grave. On a un manager permissif. En effet, il arrive constamment avec 30 minutes de retard. Du coup, il ne voit même pas nos débordements.

On monte sur le quai et là, on entend « suite à une avarie électrique les trains circulent avec 15-20 min de retard ». Ça continue mais on est blasé. On cherche un banc gelé, on sort son livre et on attend patiemment. On a appris ici. On ne crie pas, on ne parle pas, ça ne sert à rien. On attend patiemment quelque soit les événements à répétitions. Mais, intérieurement, on prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie que le train arrive vite et soulage nos mains et notre visage glacés mais aussi que notre vie triste et monotone s’emballe. On peut tout imaginer quand on attend comme un zombie sur un quai de gare : un vent magique qui nous emmènerait au pays d’Oz, une soucoupe volante qui nous téléporterait sur une autre planète grâce à son rayon lumineux, un billet d’euromillions gagnant perdu négligemment que l’on trouverait.

 

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article