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19 mars 2012 1 19 /03 /mars /2012 17:12

paris-RER.jpgCa y est on a réussi à avoir son RER. On pose son derrière douillet sur les sièges durs et étroits du wagon. On attrape son livre et ses gâteaux pour le petit déjeuner en essayant de manipuler l’ensemble avec seulement deux mains et en gardant dans un équilibre précaire le sac à main et sans donner de coup au voisin à une distance maximale de 10 cm. Et voilà, on a réussi, dans ce lieu mouvant et inintimiste au possible, on a réussi à créer son cocon. On se plonge dans son livre, on rejoint un autre monde et on oublie tout.

 

Quelques temps plus tard, on lève les yeux, on cherche à observer un peu le paysage en bonne nostalgique des arbres et de la verdure. Que néni ! Pour tout décor on voit des murs gris sales encombrés de poussières et de déchets. Un tunnel lugubre sans vie, fait de béton et de vide. Et encore ! On arrive à voir un tel décor quand les vitres du RER ne sont pas obscurcies par la saleté, les tags ou on ne sait quelle substance suspecte !

 

Quelques temps encore un peu plus tard, on sent une raie de lumière froide nous traverser la joue…ça y est la surface !! Tellement heureux de revoir la lumière du jour comme si on vivait dans une geôle depuis 10 ans qu’on oublie que cela signifie qu’on est arrivé. On descend sur le quai bondé, où là ce n’est pas 4 pauvres pèlerins mais plutôt 200 qui se bousculent pour descendre les escaliers vertigineux. On ne sait jamais, on pourrait perdre au moins deux minutes pour arriver à son poste !! Et là, à nouveau on prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie pour du haut de nos talons, ne pas tomber dans cette cinquantaine de marches, malmenée et pousser par ces parisiens si pressés.

 

On sort enfin devant la gare. On s’arrête deux secondes pour allumer sa clope et là…Vlan, on se prend le briquet dans l’œil et on se brule l’ongle du pouce…C’est vrai, on oublie si facilement…Ici rien ne s’arrête, tout court au mépris de la personne humaine. On est qu’un obstacle de plus au passage de la vague grouillante de cadres dynamiques plein de zèle courant comme de beaux toutous rejoindre leur poste. Le pire c’est que l’œil rougeoyant et larmoyant on se fait insulter : «  mais ce n’est pas possible de rester dans le passage !! Vraiment les gens n’ont plus aucun savoir vivre ! »

Je vous le demande : qui réellement n’a plus de savoir-vivre ou plutôt de respect pour la vie ? 

Entre nous : Ce n’est pas comme si on se mettait devant un passage étroit empêchant les gens de circuler. Nan on est sur une place qui doit bien faire 100m² mais à Paris, on n’a pas le droit de s’arrêter, de refaire son lacet, de souffler. Par miracle, si on y arrive, on doit se coller contre un mur en espérant qu’un abruti ne trouve pas encore le moyen de vous donner un coup de coude ou d’épaule bien visé.

 

Alors, on se tait, on n’a pas envie d’avoir le deuxième œil amoché, on avance au son du clac-clac des talons,  une voûte plantaire qui chauffe, des frissons de froid sur tout le corps, un œil pleurant et rouge, un ongle de pouce qui sent la chair carbonisée. On arrive devant la porte de la société on écrase sa clope dans les éteignoirs et on cherche son badge et on prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie de ne pas rencontrer le même problème qu’avec la carte de transport. Cette fois-ci, la carte était bien à sa place ! Ouf ! Enfin une bonne nouvelle !

 

On traverse le grand hall, on jette un coup d’œil au bar où on peut acheter des cafés, viennoiseries et autres petits déjeuners. Comme chaque matin la queue d’une vingtaine de personnes décourage et on se dirige vers les ascenseurs en préparant un sourire de circonstance. On met son masque de bonne humeur et de jovialité. On prépare son « salut machin ! Comment vas-tu ? » (Enfin quand on a la chance de se rappeler du prénom de machin toujours un peu plus hautin).

Ensuite à défaut de trouver un sujet de discussion avec machin qu’on ne connaît pas, à par l’avoir croisé à de multiples reprises dans les couloirs, on fige son sourire. Puis, toujours aussi docile depuis le début de la matinée, on attend sagement l’ascenseur. C’est idiot, dans ces cas, même quand on s’en fou mais alors on se fou à un point de machin, on ne peut pas s’empêcher de chercher désespérément un sujet de conversation.

 

Evidemment, on le trouve pas, à moins qu’on soit Lundi, dans ce cas, on peut énoncer avec toute la fausse sympathie dont on est capable « tu as passé un bon weekend ? » Bah oui, on se tutoie, même si on connait mieux son banquier qu’on voit tout les trois ans que machin. Et là, si on a de la chance, machin, bavard, raconte son super weekend en Angleterre, en Irlande, quelque part en Europe. Machin raconte avec multiples détails son hôtel trois étoiles, le spa, les soirées, que nous, même en rêve, on n’y penserait pas.

Les portes de l’ascenseur s’ouvre enfin, on badge son étage et on prie pour que machin faignant au possible descende au premier mais non, voilà que machin travaille au cinquième également. Alors pendant que l’ascenseur monte, on a encore le temps d’entendre les visites qu’il a effectuées, la cuisine des grands restaurants qu’il a gouté quand…l’ascenseur s’ouvre. On sort calmement avec flegme même si on a qu’une envie c’est de mettre des bouchons d’oreilles, ou de lui flanquer son poing dans la figure pour qu’il arrête de déblatérer sur un week-end dont on s’en fou et qui a fini par achever notre journée mal commencée. On affiche à machin notre plus beau sourire et on s’entend dire «  C’était vraiment un beau week-end et dépaysant. Je passerais te voir pour que tu me donnes les infos. Je crois que je vais me laisser tenter aussi. Bonne journée ». Bien sûr, dix secondes après on a oublié machin et probablement lui aussi.

 

On se dirige vers son bureau, On prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie de ne croiser personne et surtout que dans ce bureau où travaille quatre collaborateurs, personne ne soit arrivé. Et ben...Devinez…personne ouf ! On pose son sac, on enlève son manteau, on attrape sa tasse à café, le café en poudre et on va chercher de l’eau chaude. On revient s’assoir à son bureau, on déverrouille sa session et là, on se retrouve devant un fait inaltérable : on est assis devant son bureau pour une journée de huit heures et on a rien d’autre à faire que de travailler…et ben si, accompagnée de sa tasse à café, on retarde le moment fatidique, on évite du regard la dizaine de post-it sur le bureau qu’on a laissé pour ne rien oublier et on ouvre une page internet.

 

On commence par aller voir ses mails, on supprime une quantité impressionnante de pub en tout genre mais on trouve ça drôlement attractif quand on est au boulot. Ensuite, on va jeter un coup d’œil sur le réseau social des animaux. On admire son animal, on regarde les autres, on rêve un jour d’avoir un sacré de Birmanie ou un Maincoon. Une fois que l’on trouve plus rien sur le site, on retourne sur google du coté des actualités. Là, on s’intéresse à tout, même au « Un homme à nouveau poignardé à Marseille », « l’alerte orange neige est maintenue sur 36 départements ». On lit le plus sérieusement du monde les articles même si le contenu n’en apprend pas plus que le titre. Et puis, arrive un moment, où on a tout épuisé, réseau social, actualités, mails. A ce moment-là ça fait bien trente-quarante minutes qu’on est là. On se décide à commencer à bosser doucement : On regarde ces mails professionnels. Et là…Oooh miracle, on est sauvé ! Un « gentil » collègue a apporté le petit déjeuner. Evidemment on se doutera que ce n’est pas par pur altruisme mais ne pas ramener de temps en temps le petit déjeuner dans son équipe vaut les critiques les plus acerbes et les plus outrées :

« Il vient toujours prendre une part de gâteau, une viennoiserie » « il vient même se resservir dans la journée, tu imagines !! » « Par contre, jamais, il n’achèterait un paquet de croissants ».

Enfin, on les comprend ces gens qui ramène rien, quand on est entouré de personnes à la critique si facile et pour qui le moindre défaut est passé au crible et surtout l’apparence, on n’a pas envie de les nourrir. Et puis, une vingtaine de personnes à nourrir en comptant deux viennoiseries par personne, c’est plus un petit paquet...ca fait un trou dans le porte-monnaie ! 

 

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15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 16:11

quai-de-gare.jpg

 

Ce matin, comme à mon habitude, les cheveux encore mouillés de la douche et attachés négligemment par une pince à cheveux, je ferme la porte de mon appartement et descend le vieil escalier des années 70 de mon immeuble. J’actionne le petit bouton sur la porte en m’appuyant lourdement sur celle-ci. Evidemment ! Sinon, cette technologie de pointe dans un but ultra-sécuritaire se referme immédiatement et on a beau appuyer de nouveau sur ce petit bouton qui écorche le doigt, on ne sort jamais.

 

Je sors donc, sous l’air glacial de ce mois de Février. Il fait encore nuit. C’est déprimant. Cachée sous un bonnet en laine, une écharpe et un manteau fin - faudrait pas ressembler à une banlieusarde en mettant une doudoune!- On marche vite, on essaie d’échapper au vent qui s’infiltre dans les interstices mais cet air froid pernicieux vise toujours les quelques centimètres de peau non couverte et les envahit jusqu’à les glacer.

 

Alors on marche vite, accompagnée du bruit monotone du clac-clac des talons hauts sur le bitume froid et gris. On n’y pense pas mais on regrette déjà d’avoir mis ces talons. On cherche toujours à paraître coquette, jolie et surtout classe…Bah oui quand on travaille dans un groupe international qui se vente de sa position de Leader français, on ne se permet pas la moindre erreur. C’est sûr qu’à 7h30 du matin, cachée sous de l’anticerne, du fond de teint, de la poudre, du blush, du fard à paupière et du mascara fraîchement déposé, on présente bien…mais ce soir, des cernes jusqu’aux joues, avec un fard effacé, un fond de teint atténué, on aura l’air d’un cadavre déguisé en clown mais on aura donné le change. On aura été fidèle à l’image que nous devons donner en temps que représentant de l’entreprise.

 

Ah mais, on allait oublier !! Il y aura ces si jolies bottes à talons qui valent les regards appuyés des jalouses et les compliments des autres…Je vous le dit, il n’y a pas de quoi ! Oooh, Elles sont jolies mais elles ne tiennent pas chaud et en plus marcher avec un dénivelé de 10 cm toute la journée…vous imaginez votre voûte plantaire ? Nan, vous ne pouvez pas…Seules les femmes, prisonnières comme moi du devoir de paraître le peuvent.

 

Bon pendant, ces réflexions, perchée sur nos talons, on avance et on fini par arriver à l’arrêt de bus. Alors, sagement comme un chien bien dressé, on attend. On rentre ses mains dans ses poches. On prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie que le bus arrive vite. Evidemment, c’est toujours ces jours là, où on a mis de hauts talons, où le manteau est trop léger et qu’il fait au moins -15°C (température ressentie, s’il vous plait), qu’on attend 10 min avant de voir se profiler au loin l’avant du bus. 

 

On se réjouit. On voit le bus arriver à toute allure et c’est là qu’on tilte : la carte de transport !! On sort laborieusement ces mains des poches du manteau, On essaie d’enlever les gants tout en avançant vers les quatre pèlerins agglutinés, qui se bousculent à l’entrée du bus. On ne sait jamais : Le chauffeur pourrait refermer les portes devant votre nez et vous empêcher de monter !! Et là les gants dans une main, on ouvre son sac à main, sauf que…Mesdames, vous compatirez avec moi : On ne sait pas pourquoi mais il y a toujours des choses étranges dans un sac de femme - Tout un tas de petites choses indispensables, surtout à emmener partout et que l’on n’utilise jamais - En plus, la carte de transport que l’on range proprement à chaque fois dans une petite poche intérieure pour la retrouver facilement n’est plus là. Evidemment, hier, on était pressée et on l’a glissée négligemment dans le sac…cela ne signifie qu’une chose… Il va bien falloir 10 bonnes minutes pour retrouver la dite carte et peut-être même vider le sac.

C’est désespérant, non ! Je vous le dit le destin s’acharne contre nous, pauvres femmes…

Alors, on jette un regard discret au conducteur…Ouf, il est tellement occupé à regarder le décolleté de la jeune fille à peine pubère qu’il ne verra pas qu’on ne pointe pas –Une petite parenthèse : vous avez remarqué, il y a toujours une jeune fille ou une jeune femme défiant les lois de la nature qui se balade à -15 dehors, avec un petit blouson, un décolleté jusqu’au nombril et en mocassins. Je vous le dit ces nanas, soit elles ont un chauffage en filigramme greffé dans leur peau, soit il leur manque des terminaisons nerveuses pour ne pas sentir le froid…

 

Toutefois, à leur décharge, on n’a pas froid dans le bus. Bah oui, quand on ne se retrouve pas collé contre la vitre, le chauffage est à fond. Au bout de 5 min, on se retrouve transpirant, on prit, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie que le pull blanc que l’on a mis ne reflète pas cet état. Et puis, on essaie discrètement d’éponger les gouttes qui ruissellent le long de notre visage. Pas moyen qu’un abruti de chauffage ruine tout ce travail de maquillage !!

 

On arrive enfin devant la gare RER, on met le pied dehors et là, on se prend une gifle !! Et oui, 40°C de différence en une microseconde, c’est dur. On reprend notre marche, au rythme du clac-clac des talons en serrant légèrement les dents.  Bah oui, une marche jusqu’à l’arrêt de bus et la station debout pendant le trajet a déjà mis à mal notre voûte plantaire.

Tout en marchant tant bien que mal, on cherche sa carte de transport. Cette fois-ci, on n’y échappera pas, pour se rendre sur le quai du RER, on devra valider son titre à la borne. On fouille mais évidemment, on ne la trouve pas. C’est toujours dans ces moments-là que ce bien précieux parvient à se cacher dans un espace de 20cm carrés. On se résigne, on commence par transférer le paquet de mouchoirs en papier, le portable, la pochette de maquillage dans une poche intérieure vide. Cela laissera un peu de place pour déterrer la dite carte. On continue nous fouilles archéologiques tout en marchant clopin-clopant. On déterre, une vieille barre de céréales, des tickets de caisse et de parking, la totote de la petite qu’on cherchait depuis trois mois mais toujours pas de carte. Alors on fini par se résigner. On s’arrête devant les bornes de la gare, on essaie de ne pas s’énerver par les gens qui même avec un mètre d’espace pour circuler, trouve le moyen de vous bousculer. On transfère le contenu du sac, tant bien que mal dans nos poches, puis une main, en gardant l’autre libre pour fouiller. On sort le portefeuille, le chéquier, le porte monnaie, les clefs, la bouteille d’eau. On fini par se retrouver le sac vide et là… toujours rien. Là, on commence à avoir des sueurs, on se dit qu’on a trouvé le moyen de la perdre !

Alors on entreprend la démarche inverse, tout en jetant un coup d’œil sur l’arrivée prochaine du RER. On examine le porte-monnaie, la bouteille d’eau sous tous les angles. On vide ses poches, on re-rempli le sac à main et là coincée entre les deux plis du portefeuille, on voit quoi…la carte de transport.

 

Evidemment à ce stade, on a envie de tout jeter par terre et de rentrer se coucher mais on est courageuse alors même si on sent les nerfs se tendre, on souffle un bon coup, on referme le sac tant bien que mal et on valide enfin sa carte. On regarde les écrans d’affichage et on s’étonne que notre RER ne soit même pas à l’approche. Blasée, on se dit qu’il y a un peu de retard : 5-10 min, ce n’est pas grave. On a un manager permissif. En effet, il arrive constamment avec 30 minutes de retard. Du coup, il ne voit même pas nos débordements.

On monte sur le quai et là, on entend « suite à une avarie électrique les trains circulent avec 15-20 min de retard ». Ça continue mais on est blasé. On cherche un banc gelé, on sort son livre et on attend patiemment. On a appris ici. On ne crie pas, on ne parle pas, ça ne sert à rien. On attend patiemment quelque soit les événements à répétitions. Mais, intérieurement, on prie, on ne sait pas trop quel dieu ou entité de nos jours mais on prie que le train arrive vite et soulage nos mains et notre visage glacés mais aussi que notre vie triste et monotone s’emballe. On peut tout imaginer quand on attend comme un zombie sur un quai de gare : un vent magique qui nous emmènerait au pays d’Oz, une soucoupe volante qui nous téléporterait sur une autre planète grâce à son rayon lumineux, un billet d’euromillions gagnant perdu négligemment que l’on trouverait.

 

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15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 10:53


Une personne qui marche.

 Une personne qui parle.

Une personne qui rit, qui s'active.

Une femme qui vit.

Puis, un jour, une douleur brève.
Une pointe qui s'installe. Besoin de repos.

Un autre jour. Petit déjeuner, vaisselle, journal, ménage.
Encore cette douleur.
Elle s'assoit. Encore cette souffrance.
Premier analgésique. Elle s'allonge, soupire.

Un autre jour.

La douleur devient omniprésente.
Les cachets s'accumulent.
A quoi servent-ils? Ils ne la soulagent pas.

Le soleil se lève. Elle ne peut pas quitter son lit.
Elle a trop mal. Elle veut pleurer mais ne peut pas.

Le soleil continue sa course, elle se tourne sur le coté, souffle le temps que la pointe lancinante s'estompe. Elle étire une jambe puis l'autre.
Elle respire...deux, trois fois, Aller!!
Elle s'est redressée, assise sur le lit, elle serre, serre les dents pour ne pas crier.
Elle pousse fort sur ses bras. La voila debout.
 
Un, deux, trois pas. Son genou, son dos...la lance tellement!!
Aller courage! Au bout du couloir se trouve la cuisine, et dans la cuisine...les cachets.
Un pas après l'autre, elle avance, les bras s'appuyant lourdement sur les murs.
La boite! Elle la voit sur la table!
Elle voit aussi sa belle-fille qui fait la vaisselle.
Mais quelle heure est-il? Ils ont mangé?
Elle l'entend lui demander comment elle se sent. Que lui répondre? Que la douleur arrache ses tripes, Que la douleur lui donne envie d'avaler toute la boite, pour dormir, dormir et, mourir...
Elle s'assoit sa belle fille lui tend un verre d'eau, lui sourit compatissante.
Veut-elle manger? Non. Rien. Le gout amer des médicaments règne dans sa bouche. Elle n'a goût à rien. Juste dormir, oublier la douleur.

Elle engage une conversation insipide, sans goût, comme sa vie. Elle lâche, sans le vouloir, qu'elle voudrais en finir avec son dos, qu'elle est prête à faire une overdose de cachets.
Elle ne voit pas mais son fils et sa compagne blanchissent. Elle ne sait pas que cette phrase en l'air, va détruire, paniquer son fils.
Elle ne sait pas que son fils va arrêter de dormir, plein de son amour et de son besoin d'elle.

Elle retourne se coucher. Que faire d'autre? Elle n'arrive même plus à lire, à faire ses mots croisés.
Son compagnon entre. Elle commençait à oublier la douleur, à s'endormir. Pourquoi entre-t-il? Pourquoi la dérange-t-il? Toujours là, à l'ennuyer, sur son dos, avec ses commentaires et sa tête qu'elle ne veut plus voir.
Il veut l'emmener à l'hôpital. Ils se sont concertés. Ils sont d'accord. Ils parlent quand elle n'est pas là.
Que disent-t-ils? Qu'elle est si mal, qu'elle ferait mieux d'être placée pour leur foutre la paix?
Elle n'aime pas dépendre des autres. Mais elle n'a pas le choix. Et puis peut-être les médecins sauront quoi faire.

Les secousses de la voiture, la torture. Les dos d'ânes son des poignards enfoncés dans son corps. Il roule si vite, si brusque.
L'hôpital, l'attente. La souffrance d'être assise. Les minutes qui s'égrainent lui arrachent des soupirs de douleurs.
On l'appelle, enfin!! Un lit! Oh oui un lit s'il vous plait. Elle s'allonge. son corps n'est que des tessons de verre que s'enfoncent dans sa chair.
Son compagnon explique son dos, ses vertèbres. Qu'il s'en occupe, grand bien lui fasse!!
On lui met une perfusion. De la morphine! Oh oui, s’il vous plait, de la morphine!! Pas assez. C’est trop peu. La douleur est encore là. Trop forte.
Elle doit se lever. Ils ne la garde pas. Elle rentre chez elle. Une ordonnance pleine de calmants à la main, un pour le scanner dans l'autre.

 

Le temps passe mais pas la douleur. Elle reste alitée presque toute la journée. Ses nouveaux cachets ne la soulagent plus. Son genou est un gouffre de souffrance qui la paralyse. Elle ne mange plus.

Son compagnon la lève. C'est le jour du scanner. La voiture encore. Monstre qui détruit son corps et lui donne envie de disparaitre. La table de scanner. Dure, froide... Oh la douleur! La technicienne place une plaque de métal sous son dos. Elle s'entend crier, pleurer "non, je ne peux pas; enlevez-la!!" L'examen se fait. C’est rapide il parait. Mais pas pour elle. La souffrance est plus forte de seconde en seconde. Puis c'est fini. L'attente sur un siège terrible commence...
Les résultats: 4 hernies discales aux lombaires et une racine nerveuse complètement écrasée.
Le retour. La voiture. Des cachets. Un peut de yaourt liquide. Le lit et le sommeil court.

Ce matin son réveil sonne. Sa belle-fille l'emmène chez la rhumatologue.
La voiture encore... pourquoi et toujours c'est horrible et violent engin!!
Elle roule doucement, lui dit qu'elle fait attention. Mais elle a MAL!!!
La doctoresse la reçoit, examine le scanner, essaie de la faire bouger augmentant terriblement sa souffrance.
Elle ne peut réaliser d'infiltration à cause de l'appareillage qui maintient ses vertebres. Elle lui donne de la morphine, beaucoup de morphine et des séances de kinésithérapie. De la MORPHINE, enfin!!!

Elle est couchée dans son lit. Sa belle-fille arrive, triomphante des boites de morphine à la main. Elle en prend. Ce soir, elle dormira peut-être.
Non, elle ne veut pas manger.

Elle a mal encore. Moins mais toujours. Son cerveau est embrumé mais une idée fixe s'installe. Il faut qu'elle s'assoie par terre sinon elle va tomber.
Elle descend péniblement de son lit s'assied par terre, en chemise de nuit, frissonnante.
Son compagnon entre. il veut savoir pourquoi elle est au sol. Elle lui explique. Il ne veut pas comprendre. Elle essaie de se lever mais n'y arrive pas. Il l'a prend dans ses bras, la couche. Elle s'endort.

Une envie pressante la réveille. Elle se lève. La douleur est effroyable. Elle entend du bruit dans la cuisine, penche sa tète et voit sa belle-fille, qui la regarde. Elle approche doucement, tout doucement. Elle ne contrôle plus ses jambes, ses bras.
Elle s'assied sur une chaise. Elle cherche vaguement sa morphine. Sa belle-fille pose la boite devant elle, avec un verre d'eau.
Elle dit quelque chose mais les mots sortent à peine. Sa belle-fille ne comprends pas. Elle lui demande de répéter doucement. Pourquoi la regarde-t-elle comme ça?
Elle traine sa main sur la table, elle n'arrive pas à la soulever, à prendre la boite. Sa belle fille sort un comprimé le pose devant elle.
Elle a du mal à tenir sur sa chaise. Sa main a toutes les difficultés à saisir le cachet. Elle hoche vaguement de la tête quand on lui propose le yaourt à boire.
Elle regarde le verre de yaourt. Elle veut le prendre, mais le verre semble loin à sa main. Elle fini par le toucher. Elle n'arrive pas à le soulever. Sa belle -fille prend le verre l'approche de ses lèvres. Elle penche la tête, avale difficilement, quelques gorgées. Elle n'en veut plus c'est trop sucré...
Elle veut se lever. C’est dur. Si dur. Son fils la soutient. Pas à pas. Elle vacille. Elle se tient aux murs comme il est possible. Elle voit l'embrasure de la porte, puis son lit. Presque. Elle y arrive. Son fils la couche, la borde.
Elle ferme les yeux. Elle ne sait plus où elle est. Qui elle est. La douleur s'estompe. La morphine agit.

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8 février 2012 3 08 /02 /février /2012 17:34

 

Ce matin, je me suis réveillée, sous une couette chaude et moelleuse. Un de ces matins où l'on est si bien dans son nid qu'on voudrait toujours y rester. C'est un matin de coton, de douceur, de sécurité, de silence paisible. Les yeux au-dessus de la couette, j'ai porté mon regard vers la fenêtre, ou plutôt vers les arbres nus de ce mois de janvier. Ces arbres sont si tristes dans le froid hivernale sans leurs couleurs chatoyantes. 


Pourtant, ce matin, le monde avait changé. Les arbres, le sol aride et morne étaient recouverts d'un duvet blanc, vaporeux et pur. 


Quelques moments plus tard, munies d'une paire de bottes bien chaudes, d'épaisses fourrures et de velours, je me plaçais sur le pas de la porte. 


Quand la nature se couvre de douceur blanche, le moment le plus important est le premier pas en dehors de son foyer. On ouvre la porte et c'est une autre dimension qui se découvre à nous. Un silence de soie et de feutre, des craquements sourds, des bruits furtifs. La nature même semble vénérer cette déesse blanche qui endort le monde. Tout se tait. Le vent lui-même retient son souffle, les animaux disparaissent et les arbres se taisent. 


Le premier pas est primordial. En effet, il y a les citadins, les indifférents et les égoïstes qui foncent comme des brutes et cassent la magie de cette présence. 


Cependant, il y a aussi les poètes, les rêveurs et les amoureux qui savent que le premier pas, le premier craquement peut ajouter à la magie de l'instant. Ceux là sont des romantiques, des humanistes et des cœurs sensibles qui respectent et aiment chaque vie. Ceux la font le premier pas avec toute la déférence dû à cette déesse blanche qui nous emporte dans un univers de paix de douceur et de silence ouaté.


J'ai fait ce premier pas, délicatement. J'ai regardé mon pied s'enfoncer dans la neige, cette mousse légère me recouvrir. J'ai écouté le craquement en harmonie avec la nature. J'ai lu dans le silence et le bruit sourd toute la beauté et l'amour de ce moment.


Puis, pas à pas, j'ai vu cette douceur blanche sur les branches, j'ai vu les murets et les fosses disparus. J'ai vu la pureté d'un sol immaculé et lisse. Des diamants paraient les ramures comme autant d'étoiles dans un ciel sans nuage. Les buissons semblaient douillettement vêtus dans leur manteau blanc parsemé de strass. 


Ainsi, j’ai écouté, j'ai regardé, j'ai senti, j'ai goûté la nature chanter dans son frileux sommeil. Elle chantait une histoire de paix, de joie, de tristesse, d'amour. Elle narrait une histoire de naissance, d'épreuves, de douleurs, d'humour. Son silence et son sommeil racontait la vie.


 

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  • : Cet air conte une histoire
  • : C'est l'histoire d'une vie de toutes les couleurs. C'est l'histoire d'un amour de douleur. C'est le temps de quelques joies et bonheur. C'est le temps de quelques hésitations et terreurs.
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  • J'ai toujours aimé découvrir de nouvelles histoires, l'espoir, la philosophie et les connaissances qui se cachaient derrière de simples romans. Alors, à mon tour, je souhaite vous faire découvrir la magie du Verbe, la magie des mots.
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